Cher Mathieu, cher Thomas,
Quand vous etiez petits, j'ai eu quelquefois la tentation, a Noel, de vous offrir un livre, un Tintin par exemple. On aurait pu en parler ensemble apres. Je connais bien Tintin, je les ai lus tous plusieurs fois.
Je ne l'ai jamais fait. Ce n'etait pas la peine, vous ne saviez pas lire. Vous ne saurez jamais lire. Jusqu'a la fin, vos cadeaux de Noel seront des cubes ou des petites voitures.
Quand vous etiez petits, j'ai eu quelquefois la tentation, a Noel, de vous offrir un livre, un Tintin par exemple. On aurait pu en parler ensemble apres. Je connais bien Tintin, je les ai lus tous plusieurs fois.
Je ne l'ai jamais fait. Ce n'etait pas la peine, vous ne saviez pas lire. Vous ne saurez jamais lire. Jusqu'a la fin, vos cadeaux de Noel seront des cubes ou des petites voitures.
Jusqu'a ce jour, je n'ai jamais parle de mes deux garcons. Pourquoi ? J'avais honte ? Peur qu'on me plaigne ? Tout cela un peu melange. Je crois, surtout, que c'etait pour echapper a la question terrible : « Qu'est-ce qu'ils font ? »
Aujourd'hui que le temps presse, que la fin du monde est proche et que je suis de plus en plus biodegradable, j'ai decide de leur ecrire un livre.
Pour qu'on ne les oublie pas, qu'il ne reste pas d'eux seulement une photo sur une carte d'invalidite. Peut-etre pour dire mes remords. Je n'ai pas ete un tres bon pere. Souvent, je ne les supportais pas. Avec eux, il fallait une patience d'ange, et je ne suis pas un ange.
Quand on parle des enfants handicapes, on prend un air de circonstance, comme quand on parle d'une catastrophe. Pour une fois, je voudrais essayer de parler d'eux avec le sourire. Ils m'ont fait rire avec leurs betises, et pas toujours involontairement.
Grace a eux, j'ai eu des avantages sur les parents d'enfants normaux. Je n'ai pas eu de soucis avec leurs etudes ni leur orientation professionnelle. Nous n'avons pas eu a hesiter entre filiere scientifique et filiere litteraire. Pas eu a nous inquieter de savoir ce qu'ils feraient plus tard, on a su rapidement que ce serait : rien.
Et surtout, pendant de nombreuses annees, j'ai beneficie d'une vignette automobile gratuite. Grace a eux, j'ai pu rouler dans des grosses voitures americaines.
Aujourd'hui que le temps presse, que la fin du monde est proche et que je suis de plus en plus biodegradable, j'ai decide de leur ecrire un livre.
Pour qu'on ne les oublie pas, qu'il ne reste pas d'eux seulement une photo sur une carte d'invalidite. Peut-etre pour dire mes remords. Je n'ai pas ete un tres bon pere. Souvent, je ne les supportais pas. Avec eux, il fallait une patience d'ange, et je ne suis pas un ange.
Quand on parle des enfants handicapes, on prend un air de circonstance, comme quand on parle d'une catastrophe. Pour une fois, je voudrais essayer de parler d'eux avec le sourire. Ils m'ont fait rire avec leurs betises, et pas toujours involontairement.
Grace a eux, j'ai eu des avantages sur les parents d'enfants normaux. Je n'ai pas eu de soucis avec leurs etudes ni leur orientation professionnelle. Nous n'avons pas eu a hesiter entre filiere scientifique et filiere litteraire. Pas eu a nous inquieter de savoir ce qu'ils feraient plus tard, on a su rapidement que ce serait : rien.
Et surtout, pendant de nombreuses annees, j'ai beneficie d'une vignette automobile gratuite. Grace a eux, j'ai pu rouler dans des grosses voitures americaines.
Jean-Louis Fournier
Livre drôle malgré le sujet et le "sort" qui s'acharne sur l'auteur.
RépondreSupprimerA lire ! beau témoignage qui remet les choses à leurs places quand on a tendance à se lamenter pour rien... Val
RépondreSupprimerMerci "Poulpie" de m'avoir fait découvrir ce livre. Le sujet est tellement triste et l'auteur parle tellement vrai que ça en devient même choquant parfois... mais comment lui en vouloir ?
RépondreSupprimerBravo pour le politiquement incorrect.
Clairette